L’équilibre budgétaire toujours pas au rendez-vous dans cinq ans

Depuis l’arrivée au pouvoir du gouvernement de M. Trudeau en 2015, tous les budgets ont été écrits à l’encre rouge. Le présent budget n’y fait pas exception et un retour à l’équilibre budgétaire ne pointe toujours pas à l’horizon. L’énoncé économique de novembre 2022 laissait même entrevoir un surplus budgétaire dès l’année 2027-2028, mais ce troisième budget de la ministre des Finances, l’honorable Chrystia Freeland, vient confirmer que les déficits perdureront au moins jusqu’à la fin de ce plan budgétaire quinquennal. Pour 2027-2028, le déficit s’établit désormais à 14 G$.

Les recettes du gouvernement ont été plus importantes grâce aux revenus générés par l’inflation. Les revenus budgétaires anticipés lors du budget de mars 2022 étaient de l’ordre de 408,4 G$ pour l’année en cours qui tire à sa fin (2022-2023), alors qu’ils sont évalués maintenant à 437,3 G$ selon le budget 2023. Quant aux déficits appréhendés lors du dépôt du budget de mars 2022, ils se chiffraient à 52,8 G$ pour l’année 2022-2023 et à 39,9 G$ pour l’année 2023-2024. Les déficits prévus dans l’actuel plan budgétaire à l’égard de ces deux mêmes exercices financiers sont établis, respectivement, à 43 G$ et à 40,1 G$. À terme, soit pour l’année 2027-2028, la dette fédérale se chiffrerait à 1 312,5 G$.

Bien que les flambées inflationnistes aient, d’un côté, permis au gouvernement fédéral d’engranger des revenus supplémentaires, elles ont, de l’autre, miné le portefeuille de nombreux Canadiens. C’est pourquoi le gouvernement accorde une grande importance à soutenir les Canadiens à faible revenu afin qu’ils puissent composer davantage avec des factures élevées, tout en misant sur différentes mesures d’allégements financiers et fiscaux pour plusieurs particuliers.

De l’air frais pour de nombreux Canadiens

Le présent budget contient, entre autres, les mesures suivantes.

Un nouveau remboursement unique pour l’épicerie, qui prévoit un allégement ciblé de l’inflation de 2,5 G$ pour les Canadiennes et les Canadiens qui en ont le plus besoin. Le remboursement pour l’épicerie sera versé par l’Agence du revenu du Canada sous forme de paiement unique dans les plus brefs délais une fois le projet de loi adopté.

  • 11 millions de personnes et de familles à revenu faible ou modeste au pays pourront recevoir une aide financière, selon leur situation : jusqu’à 467 $ pour les couples avec deux enfants, jusqu’à 234 $ pour les personnes seules sans enfant, et un supplément de 225 $ en moyenne pour les personnes âgées. Cette aide sera offerte par l’intermédiaire du crédit pour la taxe sur les produits et services.

Un financement de 813,6 M$ en 2023-2024 pour améliorer l’aide financière aux étudiants (à noter : le gouvernement du Québec a son propre programme et n’est donc pas ici visé). Pour l’année scolaire commençant le 1er août 2023, cette aide comprend les mesures suivantes :

  • Augmenter les Bourses d’études canadiennes de 40 % de manière à fournir jusqu’à 4 200 $ aux étudiants à temps plein;
  • Rehausser le plafond des prêts d’études canadiens sans intérêt de 210 $ à 300 $ par semaine d’études;
  • Renoncer à l’obligation pour les étudiants adultes âgés de 22 ans ou plus de subir un examen de crédit afin d’être admissibles pour la première fois à des bourses et à des prêts fédéraux pour étudiants. Grâce à cette mesure, jusqu’à 1 000 étudiants supplémentaires pourront bénéficier de l’aide fédérale dans l’année à venir.

Un financement de 13,0 G$ sur cinq ans, à compter de 2023-2024, et de 4,4 G$ par année par la suite, pour la mise en œuvre du Régime canadien de soins dentaires. Le régime couvrira les soins dentaires des Canadiens non assurés dont le revenu familial annuel est inférieur à 90 000 $, tandis que les personnes dont le revenu familial est inférieur à 70 000 $ n’auront pas à payer de quote-part. Le régime, administré par Santé Canada avec l’appui d’un administrateur de prestations tiers, commencerait à offrir une protection d’ici la fin de 2023. Les détails sur la couverture admissible seront présentés plus tard cette année.

Les institutions financières pourront commencer à offrir aux Canadiennes et aux Canadiens le compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété (CELIAPP) à compter du 1er avril 2023.

Des mesures pour soutenir l’économie verte et les entreprises

Par ailleurs, en vue de stimuler la croissance économique, différentes mesures sont annoncées, particulièrement à l’égard des technologies propres. Parmi celles-ci, soulignons les principales.

Un crédit d’impôt à l’investissement pour la fabrication de technologies propres de 4,5 G$ sur cinq ans à compter de 2023-2024. Ce crédit d’impôt remboursable va équivaloir à 30 % du coût des investissements relatifs à la nouvelle machinerie et au nouvel équipement utilisés pour fabriquer ou transformer des technologies propres clés et extraire, transformer ou recycler les principaux minéraux critiques.

Un crédit d’impôt à l’investissement pour l’hydrogène propre de 5,6 G$ sur cinq ans à compter de 2023-2024. Le présent budget annonce les détails de ce crédit d’impôt dont les caractéristiques de conception clé sont les suivantes :- Les niveaux de soutien varieront entre 15 % et 40 % des coûts admissibles du projet; les projets qui produisent l’hydrogène le plus propre recevront les niveaux de soutien les plus élevés.

  • Cette mesure accordera également un crédit de 15 % pour l’équipement nécessaire à la conversion de l’hydrogène en ammoniac aux fins du transport. Le crédit ne sera offert que dans la mesure où la production d’ammoniac est associée à la production d’hydrogène propre.
  • Il faudra satisfaire à des exigences relatives à la main-d’œuvre pour recevoir les taux de crédit d’impôt maximaux. Si les exigences relatives à la main-d’œuvre ne sont pas satisfaites, les taux de crédit seront réduits de dix points de pourcentage. Ces exigences relatives aux conditions du travail entreront en vigueur le 1er octobre 2023 et s’appliqueront aussi à d’autres crédits d’impôt à l’investissement.

Un nouveau crédit d’impôt à l’investissement pour l’électricité propre, qui devrait entrer en vigueur à compter du budget de 2024. Ce crédit d’impôt remboursable donnera droit à 15 % du coût des investissements admissibles dans les systèmes de production d’électricité sans émission, la production d’électricité au gaz naturel réduite, les systèmes fixes de stockage de l’électricité exploités sans combustibles fossiles et l’équipement pour le transport de l’électricité entre les provinces et territoires. Le ministère des Finances consultera les provinces, les territoires et d’autres parties concernées pour définir les détails de la conception et de la mise en œuvre de cette mesure.

De plus, notons les annonces suivantes.

Des changements fiscaux pour faciliter la création de fiducies collectives des employés. La vente d’entreprise aux membres du personnel deviendrait une proposition plus attrayante pour les propriétaires qui cherchent à prendre leur retraite et les entreprises appartenant à des membres du personnel pourraient réinvestir une plus grande partie de leurs bénéfices dans la croissance. Le gouvernement sollicite les commentaires des intervenants sur la meilleure façon de renforcer les droits des employés et d’améliorer leur participation à la gouvernance des fiducies collectives des employés.

Un investissement de 625 M$ supplémentaires en 2023-2024 dans les ententes de transfert relatives au marché du travail pour s’assurer que les Canadiens continuent d’avoir accès aux soutiens dont ils ont besoin pour obtenir leur prochain emploi.

Enfin, à l’égard d’autres mesures fiscales importantes contenues dans le présent budget, deux mesures méritent d’être abordées.

Premièrement, le budget donne suite au projet de loi C-208 modifiant la Loi de l’impôt sur le revenu (transfert d’une petite entreprise ou d’une société agricole ou de pêche familiale), sanctionné en juin 2021. Des modifications sont apportées aux règles établies par ledit projet qui comportait plusieurs lacunes. Tel que décrit dans les pages suivantes, deux options de transferts admissibles s’offriront désormais aux particuliers, qui devront produire un choix à cet égard :

  • Un transfert d’entreprise intergénérationnel immédiat fondé sur des conditions de vente sans lien de dépendance;
  • Un transfert d’entreprise intergénérationnel progressif fondé sur les caractéristiques traditionnelles du gel successoral.

Deuxièmement, le budget vient modifier la règle générale anti-évitement (RGAÉ) prévue à la Loi de l’impôt sur le revenu afin d’y introduire un préambule, de changer la norme d’une opération d’évitement, d’instaurer une règle sur la substance économique, d’inclure une pénalité et de prolonger la période de nouvelle cotisation dans certaines circonstances.

Le gouvernement souhaite recueillir les points de vue des parties prenantes sur ces propositions (voir page 42 du document budgétaire intitulé Mesures fiscales : renseignements supplémentaires) et les parties intéressées sont invitées à envoyer leurs observations écrites d’ici le 31 mai 2023 au ministère des Finances Canada. Après cette période de consultation, le gouvernement a l’intention de publier les propositions législatives révisées et d’annoncer la date d’entrée en vigueur des modifications.

Pour en savoir plus sur les mesures fiscales annoncées dans ce budget, consultez notre document.

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Frédéric Gagné
Associé | CPA, M.Fisc | Fiscalité

Si l’Europe présente des occasions d’affaires intéressantes, les entreprises ne doivent pas oublier qu’elles peuvent devoir payer la TVA.

Un nombre croissant d’entreprises québécoises lorgnent l’Europe pour y exporter des produits ou offrir des prestations de services et ainsi diversifier leurs marchés. L’Union européenne (UE) est considérée comme la deuxième économie mondiale et donne ainsi accès à un vaste marché de plus de 500 millions de consommateurs.

L’Accord économique commercial global (AECG) conclu entre ses 27 pays membres et le Canada exempte notamment de tarifs douaniers la majorité des produits exportés. Toutefois, les entreprises doivent encore payer la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et s’acquitter de leurs obligations en matière de déclaration fiscale.

La TVA, presque comme la TPS-TVQ

Par son application et sa facturation, la TVA s’apparente à la taxe sur les produits et services (TPS) et à la taxe de vente du Québec (TVQ) perçues par les entreprises québécoises lors de la vente de la plupart des biens et des services au Québec. Il s’agit également d’une taxe à la consommation qui s’applique différemment selon les biens et services achetés et vendus dans l’UE.

Ce n’est pas une taxe qui pèse lourd sur les finances d’une entreprise, puisqu’elle est, tout comme la TPS et la TVQ, payée par le consommateur final. Les organisations doivent toutefois s’assurer de calculer le montant de la taxe (en euros), de l’inscrire sur la facture avec leur numéro d’identification de la TVA, puis de la verser à l’administration fiscale du pays au bon moment.

Des taux élevés et variables

Chaque pays membre de l’UE fixe ses propres taux, établis en fonction de différentes modalités : le taux normal, le taux réduit et les taux spéciaux. Le taux normal ne peut pas être inférieur à 15 % et, dans les faits, il oscille autour du taux de 20 % qui est en vigueur en France.

Le taux est encore plus élevé dans les pays scandinaves et la plupart des pays d’Europe de l’Est, variant alors de 23 % à 27 %, et est légèrement inférieur en Allemagne (19 %). Des taux réduits ou des taxes supplémentaires peuvent aussi être appliqués à la livraison de biens et services spécifiques (alcool, énergie, bijoux de fantaisie, etc.).

Une analyse préliminaire par un spécialiste pourra vous aider à déterminer les impacts des taxes européennes sur votre entreprise.

Attention aux mauvaises surprises aux douanes

Les entreprises québécoises et canadiennes ne doivent pas négliger l’importance de la TVA. Elles risquent en effet de voir leurs produits être retenus aux douanes ou à la poste si la TVA n’a pas été perçue et payée par l’entreprise qui exporte des produits. Un consommateur pourrait même avoir la très mauvaise surprise de devoir payer cette taxe au moment de recevoir son colis. Une telle situation risque fort de briser les liens de confiance, voire les relations commerciales, établis entre une entreprise et ses clients.

De plus, cette taxe étant la plus éludée et la fraude fiscale la plus fréquemment répandue en France, elle fait donc l’objet de contrôles très sévères de la part de l’administration fiscale de ce pays. Dans d’autres pays de l’UE, les sanctions sont également accrues.

Une actualisation annuelle nécessaire

Certains biens et services sont exonérés de la TVA. Cependant, les entreprises d’ici ne doivent pas présumer que, puisqu’elles ne paient pas de TPS et de TVQ, elles seront aussi exemptées de la TVA dans les pays de l’Union européenne.

Dès qu’une entreprise veut faire des affaires en Europe, elle a donc intérêt à bien comprendre les règles spécifiques applicables à la TVA. De plus, les lois en matière de TVA font l’objet d’études et de modifications chaque année.

Par ailleurs, les entreprises qui vendent des biens ou services redevables de la TVA en France peuvent être tenues de désigner un représentant fiscal qui sera chargé d’effectuer les formalités et obligations qui leur incombent. L’entreprise doit ainsi s’attendre à payer une somme annuelle élevée.

Toutefois, étant donné la complexité et la diversité des obligations fiscales, choisir un expert compétent en fiscalité internationale pourrait vous éviter de gros soucis et des pénalités coûteuses.

Cet article a été rédigé en collaboration avec Alexandre Lecomte, conseiller en fiscalité chez Raymond Chabot Grant Thornton.

27 Mar 2023  |  Écrit par :

Frédéric Gagné est expert en fiscalité au sein de Raymond Chabot Grant Thornton. Communiquez...

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