Dans de nombreux cas, le processus de transfert d’entreprise pose d’importants défis générationnels qui peuvent compromettre sa réussite.

En effet, en règle générale, les cédants et les repreneurs appartiennent à des générations différentes, qui n’ont pas les mêmes valeurs et façons de faire. Vous devez donc être sensible à ces différences, et mettre en place des modes de communication et de gouvernance qui permettront d’établir des passerelles entre les générations.

Il s’agit d’un enjeu clé, car on remarque un grand fossé générationnel entre les Québécois qui sont nés avant 1965 (les traditionalistes et les baby-boomers, qui sont à l’âge de céder leur entreprise) et ceux qui sont nés après (les générations X et Y).

Des valeurs différentes

Les traditionalistes et les baby-boomers privilégient une gestion cartésienne et considèrent le travail comme une valeur prédominante. Pour leur part, les X et les Y ont une approche de gestion plus humaine et attachent avant tout de l’importance à la concilitation du travail et de la vie personnelle.

Pour les plus jeunes, le travail est un élément parmi d’autres, une source de savoir. Sa valeur ne se mesure pas en nombre d’heures travaillées, comme c’est le cas pour les baby-boomers, mais en fonction de leur contribution à l’entreprise.

De plus, les X et les Y sont peu impressionnés par l’autorité, contrairement à leurs aînés. Ils ont été habitués dès leur plus jeune âge à travailler en équipe; ils privilégient donc une gestion et une prise de décision collectives. D’ailleurs, on observe qu’en moyenne, ce sont trois repreneurs qui assureront la relève d’un cédant.

De leur côté, les générations précédentes sont habituées à travailler de façon assez isolée, en s’appuyant surtout sur les conseils de professionnels de l’extérieur.

Le fossé entre les deux groupes est si large que, pour la première fois au Québec, l’influence générationnelle surpasse l’influence héréditaire; c’est-à-dire que la relève (les X et les Y) est davantage influencée par les valeurs et les comportements propres à sa génération que par ceux de ses parents.

On comprend aisément que cela peut susciter une certaine déception chez les parents-entrepreneurs, qui aimeraient que leur enfant « leur ressemble » un peu plus. Et surtout, cela peut engendrer beaucoup d’incompréhension de part et d’autre, et par conséquent, des tensions.

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Une approche en trois étapes

L’établissement du plan de relève est une étape clé pour prévoir des mesures afin d’aplanir les différences entre les générations et de s’assurer que cédant et repreneur(s) partagent la même vision.

Le plan de relève, qui sert à préparer le transfert sur une période d’au moins cinq ans avant qu’il soit complété, touche divers enjeux liés au transfert d’entreprise – financiers, fiscaux, légaux, stratégiques, générationnels, etc.

Nos experts travaillent en groupes d’intervention composés de divers spécialistes pour analyser ces enjeux et recommander des solutions dans le cadre d’une approche intégrée.

Dans le cas des enjeux générationnels, nous proposons une intervention en trois étapes :

  1. Sensibiliser le cédant, le ou les repreneurs ainsi que les employés aux différences générationnelles, lors de présentations et de rencontres plus ciblées.
  2. Repérer les risques que posent les différences intergénérationnelles, les points sensibles sur lesquels il faut porter une attention particulière, tant sur les plans de la gestion, des finances, des ressources humaines, du développement des affaires que des activités de l’entreprise.
  3. Déterminer des actions en conséquence, de façon à établir des passerelles entre les générations.

Prenons l’exemple d’un cédant baby-boomer qui a toujours tout décidé seul et qui communique peu avec son entourage. Nous l’aiderons à mettre en œuvre de nouvelles pratiques de communication et de gouvernance (en créant un comité de gestion et un conseil d’administration, entre autres) mieux adaptées aux valeurs et aux façons de faire des X et des Y qui prendront sa relève.

Nous veillerons alors à préciser les responsabilités du cédant, du ou des repreneurs et des employés clés, pour que chacun ait son mot à dire et joue un rôle à la mesure de ses compétences. Au besoin, nous mettrons en place des plans de développement pour bien outiller la relève, ce qui sécurisera le cédant.

Un conseil fondamental: si vous êtes un entrepreneur en processus de transfert, mettez l’accent sur le « comment ça va » plutôt que sur le « comment ça vaut », sur le bien-être et la mobilisation des personnes plutôt que sur les aspects financiers.

Sécuriser le cédant

Par ailleurs, notre équipe prend soin, dès le départ, de discuter avec le cédant pour repérer ses principales inquiétudes à l’égard du processus de transfert. Nous lui proposons ensuite diverses solutions dans le cadre du plan de relève. De façon générale, le meilleur moyen d’apaiser les craintes de l’entrepreneur est de miser sur un transfert progressif des responsabilités et de la propriété.

Voici les cinq principaux points de résistance que nous rencontrons habituellement chez les cédants :

  1. Le deuil entrepreneurial, soit le sentiment de perdre son bien et de vieillir. Un transfert progressif lui permettra d’être encore utile au sein de l’entreprise et facilitera la transition vers la retraite.
  2. La confiance à l’égard des capacités de la relève à reprendre l’entreprise. L’une des solutions est d’évaluer les compétences de la relève et d’établir un plan de développement pour remédier à ses possibles lacunes entrepreneuriales.
  3. La confiance quant à la faisabilité financière du projet. Les repreneurs pourront-ils assurer la rentabilité de l’entreprise et assumer une nouvelle dette pour payer le cédant?
  4. Les repreneurs réussiront-ils à obtenir le financement nécessaire pour payer la transaction?
  5. Les considérations fiscales liées au transfert de propriété. Le cédant aura-t-il droit à son exonération du gain en capital?

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Comment la volonté de trouver un consensus sur les défis fiscaux soulevés par la numérisation de l’économie pourrait bouleverser les principes établis en matière de prix de transfert.

Après des débuts lents et hésitants, les efforts de l’OCDE pour trouver une solution sur la manière de répartir et d’imposer les bénéfices du commerce numérique prennent de l’ampleur.

À la suite de consultations publiques, les propositions initiales formulées plus tôt cette année sont maintenant présentées par l’OCDE dans un programme de travail, par le biais de deux principaux piliers de travail, chacun présentant une série d’options détaillées.

Le G20 a donné son appui à la feuille de route de l’OCDE pour résoudre les défis fiscaux soulevés par la numérisation de l’économie et s’est engagé à travailler en vue d’obtenir un consensus sur une solution à long terme d’ici la fin de 2020.

Bien qu’un consensus à l’échelle internationale soit préférable à l’approche fragmentée qui prévaut actuellement à l’égard de l’imposition des revenus des sociétés numériques, la solution recherchée par l’OCDE pourrait potentiellement augmenter le risque de double imposition pour l’ensemble des entreprises, et non seulement pour les géants du web.

De plus, les propositions de l’OCDE sur la répartition des bénéfices et sur un nouvel impôt minimum formulées à la suite de récentes consultations publiques laissent croire que le principe de pleine concurrence, qui régit l’établissement des prix de transfert depuis des décennies, pourrait devenir désuet, ce qui occasionnerait évidemment des bouleversements importants.

Plusieurs questions se posent : quelles sont les intentions de l’OCDE et quelles sont les incidences de ses propositions? Les propositions survivront-elles au choc avec la réalité politique, qui veut que chaque état souverain contrôle sa politique fiscale en lien avec ses intérêts nationaux?

Téléchargez ce document pour en savoir plus.

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Mis à jour le 11 octobre 2023

Le modèle d’affaires de la franchise occupe une place importante au sein de l’entrepreneuriat québécois. La fiscalité du monde de la franchise possède ses particularités.

Cet article présente certains éléments que tout franchisé ou franchiseur devrait connaître afin de maximiser sa situation fiscale.

Le traitement fiscal des fonds de publicité

Un des attraits du modèle d’affaires de la franchise consiste en la possibilité pour un nouvel entrepreneur de s’associer à un réseau et à une marque déjà connus du grand public. La publicité faite pour le compte des franchisés est donc souvent, du moins en partie, un service centralisé et orchestré par le franchiseur.

Habituellement, les franchisés paient une cotisation annuelle au franchiseur, qui constitue un fonds de publicité. Le fonds est utilisé pour couvrir les coûts des efforts publicitaires du groupe.

Est-ce que la contribution au fonds de publicité pour le franchisé constitue une dépense déductible de son revenu imposable? Et qu’en est-il pour le franchiseur qui reçoit ce montant?

Le contrat de franchise permet souvent de mieux comprendre le contrôle qu’exercent le franchisé et le franchiseur sur le fonds de publicité. L’Agence du revenu du Canada s’est prononcée sur le sujet dans une interprétation technique (9819787 Redevances à recevoir, Fonds de publicité) afin de clarifier le traitement fiscal approprié pour les franchisés et les franchiseurs.

Lorsque le franchiseur ne détient aucun contrôle sur les contributions

Lorsque ni le franchisé ni le franchiseur ne possèdent réellement le contrôle du fonds de publicité, les contributions au fonds de publicité constituent des dépenses déductibles pour les franchisés puisqu’elles sont engagées dans le but de tirer un revenu. La dépense est donc déductible dans l’année où elle est payée ou payable.

Quant au franchiseur, s’il fait lui-même des contributions au fonds de publicité, ces contributions seront déductibles au même titre que pour le franchisé. Étant donné que le franchiseur ne détient aucun contrôle sur l’utilisation des fonds en lien avec les nombreuses obligations qu’il a envers les franchisés, il est possible de conclure, et ce, bien que ce dernier perçoive les cotisations, qu’il demeure indépendant du fonds et que la dépense serait déductible.

Pour cette même raison, les cotisations reçues ne seront pas incluses dans le revenu du franchiseur, étant donné que les fonds ne sont pas la propriété de ce dernier. Il est à noter que, sur le plan comptable, les transactions affectant le fonds de publicité sont généralement comptabilisées exclusivement au bilan, sans impact sur les résultats.

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Lorsque le franchiseur exerce un contrôle sur les contributions

Si le contrôle sur le fonds de publicité appartient plutôt au franchiseur selon les faits et les circonstances du contrat de franchise, les contributions versées par les franchisés devront être incluses dans les revenus du franchiseur. Ainsi, s’il y a un surplus à la fin de l’année pour des services à rendre, il pourrait être possible pour le franchiseur d’établir une provision raisonnable pour les services de publicité qui seraient à fournir après la fin de l’année.

De plus, contrairement à la situation dans laquelle le franchiseur ne détient aucun contrôle du fonds, les contributions de ce dernier ne seront déductibles qu’au moment où les dépenses seront réellement effectuées. Les contributions du franchiseur seront, dans les faits, des montants réservés pour des dépenses éventuelles et donc non déductibles au moment de la cotisation. Pour les franchisés, le traitement fiscal des contributions restera le même que dans la première situation.

Redevances et honoraires de gestion

Les redevances et les honoraires de gestion ne sont pas propres au secteur de la franchise, mais font souvent partie intégrante d’un contrat de franchise.

Les redevances sont des sommes payées par le franchisé au franchiseur en échange de l’utilisation de certains actifs (p. ex., marque de commerce, brevets). Le paiement d’une redevance est une dépense déductible pour le franchisé et est imposable pour le franchiseur qui le reçoit.

Dans le contexte des franchises, les honoraires de gestion sont souvent utilisés afin de répartir les dépenses engagées par le franchiseur au profit des franchisés en échange de certains services (p. ex., négociations avec les fournisseurs, gestion des stocks). Les honoraires de gestion étant souvent utilisés au sein d’un regroupement de sociétés, ils font souvent l’objet d’une contestation de la part des administrations fiscales, surtout dans le cadre de transactions avec lien de dépendance.

De façon générale, afin qu’une dépense soit déductible du revenu d’un contribuable, elle doit avoir été engagée dans le but de gagner du revenu et être raisonnable. La première partie du critère est habituellement facilement respectée dans le contexte de la franchise, puisque les franchisés ont comme objectifs commerciaux de générer du revenu afin d’accroître la valeur de l’entreprise pour les actionnaires.

Travailleurs bureau

Toutefois, ce que représente une dépense raisonnable n’est pas défini dans la Loi de l’impôt sur le revenu. Les positions étayées par les administrations fiscales ainsi que la jurisprudence en la matière nous permettent d’identifier certains facteurs qui seront considérés lors de l’analyse de la raisonnabilité. Généralement, les administrations fiscales considèrent que les honoraires de gestion sont raisonnables s’ils représentent la juste valeur marchande des services rendus.

Lorsque la juste valeur marchande du service rendu est facilement comparable, elle pourrait servir de balise afin d’établir un certain appui à la raisonnabilité. De plus, lorsque le franchisé et le franchiseur n’ont pas de lien de dépendance entre eux, il est plus difficile de prétendre que les transactions seraient effectuées à des valeurs qui diffèrent de façon considérable de la juste valeur marchande puisque le franchisé et le franchiseur ont chacun des intérêts économiques distincts, soit la profitabilité de leur société respective.

Il n’est pas rare qu’un franchiseur offre à ses franchisés une formule incluant la prise en charge de plusieurs tâches administratives. Le regroupement de ces tâches peut permettre aux franchisés non seulement de réaliser des économies d’échelle, mais aussi de concentrer leurs efforts sur la gestion des affaires courantes de l’entreprise.

Le franchiseur peut procéder à la refacturation aux franchisés des frais engagés, incluant une majoration ne dépassant pas 15 %, ce qui est habituellement considéré comme raisonnable.

En somme, l’aspect raisonnable des honoraires de gestion est une question de fait, ce qui doit être analysé pour chacune des situations afin de s’assurer que la dépense est déductible pour le franchisé. Il faut être particulièrement prudent dans une situation de lien de dépendance où les intérêts économiques de chacune des parties ne sont pas toujours distincts. De plus, le franchiseur doit s’assurer de conserver de la documentation pour justifier les montants facturés à titre d’honoraires de gestion.

Cet article a été rédigé en collaboration avec Marie-Danielle Roy.

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En matière de taxes à la consommation, une personne a le droit de réclamer des crédits de taxe sur les intrants (CTI) à l’égard de ses achats de biens et services uniquement s’ils sont utilisés dans le cadre d’activités commerciales (c.-à-d. dans le cadre de la réalisation de fournitures taxables et/ou détaxées).

Ainsi, une société de portefeuille dont la seule activité serait de détenir des placements ne pourrait récupérer de CTI sur les dépenses qu’elle encourt puisqu’elle n’exploite pas d’activités commerciales, puisque la réalisation de services financiers constitue une activité exonérée.

Toutefois, le législateur a prévu à l’article 186 de la Loi sur la taxe d’accise (LTA) la possibilité pour une société de portefeuille ne réalisant aucune fourniture taxable de récupérer les CTI sur les biens et services qu’elle acquiert dans la mesure où il est raisonnable de considérer qu’elle les a acquis pour consommation ou utilisation relativement à des actions du capital-actions d’une autre personne morale qui lui est liée, ou à des créances contre cette entité, si cette autre personne réalise exclusivement (c.-à-d. 90 % ou plus) des activités commerciales.

L’application de cette disposition a suscité plusieurs discussions en ce qui a trait à la question de savoir si le bien ou le service acquis par une société de portefeuille peut raisonnablement être considéré acquis pour consommation ou utilisation relativement à des actions du capital-actions d’une autre personne morale ou à des créances contre cette autre personne.

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